Martine en été

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Chaque été, c’est la même chose. Les filles aèrent leurs jambes épilées, les mecs exposent les mycoses de leurs pieds, et Martine chausse ses lunettes noires pour mater. Au calme. Et elle a de la chance parce que cette année, le très écolo H&M (attention, ça se prononce « hache et aime ») ne s’est pas foulé sur la longueur des shorts. Avec les fonds de tissus de l’an dernier, ils ont réussi l’exploit de démocratiser le short Beyoncé.
Le short Beyoncé, c’est quoi, demandez-vous à Martine ? Elle est sympa, elle vous répond : En fait, c’est un slip que si t’es jolie et que tu le portes avec un haut sympa, ça s’appelle un short. Mais que si t’as gardé les poils et que tu t’appelles Jean-Claude, y a les flics qui t’embarquent, parce que c’est plus un short.

C’est la loi. Les femmes enlèvent le bas, les hommes enlèvent le haut, les trans se démerdent, et dans tout ça, Martine a chaud. Dans le pays où Martine est née (là-bas, plus exactement), il fait chaud du 21 juin au 20 juin. Alors, comment on sait que c’est l’été ? demandent souvent à Martine, les héritiers de la dynastie Groçon (vous savez, ceux qui ont inventé la cédille !). Et Martine, dans sa bienveillance, de leur répondre : « Le savoir est une arme, maintenant tu sais. Le savoir est une arme, bébé, ne l’oublie jamais ». Oui, Martine est née dans les années 80. Oui, elle a été témoin des déboires de la mode féminine des années 90. De Paris à Bamako, le nuage n’a épargné personne.

La peau de Martine a la couleur du chocolat, mais apparemment personne ne veut croquer dedans. Son minou est un Oreo (parfois tout sec, parfois crémeux, ça dépend de l’accompagnement), mais la vérité, pour le bouffer, y a pas foule au balcon.

Martine se demande si ça va encore durer longtemps. C’est quand même pas normal qu’en cette saison chaude, elle soit la seule à être en chaleur. Tout l’hiver, les filles sont déjà difficiles à avoir, elles veulent d’abord te connaître, répondre à tes textos une fois tous les six ans…
Alors pour maximiser ses chances de serrer, Martine se retrouve à chasser dix chattes à la fois. Quant aux lapins, c’est même pas la peine, ils font moins les malins quand elle enfile son strapon.

En attendant, Martine se contente d’Ava, la version française et encore plus dégueulasse de la butch d’Orange y ze nous black. Ava. Il faut être jolie pour s’appeler Ava, non ? Pas celle-là, en tout cas. Ava n’est pas une perle, mais elle adore les Oreo. Elle bouffe celui de Martine à n’en plus finir, à un endroit où Martine ne la voit pas. Tout est lesbien dans le meilleur des mondes.

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Un texte de Jo Güstin, illustré par Lys Argente.

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